Un matin à la pharmacie, ma patiente de 72 ans, Mme Gagnon, me consulte pour un ajustement de son insuline. Au fil de notre conversation, je constate qu’elle n’a pas reçu le vaccin contre le zona. De plus, elle a reçu un traitement contre le zona il y a deux ans. Je lui propose alors le vaccin sous-unitaire contre le zona (VRZ), dont les frais ne sont pas remboursés dans son cas. Plusieurs questions lui viennent en tête : « Si j’ai déjà eu le zona, ne serais-je pas déjà immunisée? Si c’était si important, pourquoi le gouvernement ne le rembourse pas? J’aurai 75 ans dans trois ans, pourrais-je attendre pour que ce soit couvert? »
Je lui présente ensuite les avantages et les limites du vaccin, afin qu’elle puisse faire un choix éclairé.
Ce cas illustre parfaitement un défi que mes collègues et moi rencontrons depuis que nous offrons des services de vaccination au Canada : celui de trouver le juste équilibre entre les recommandations scientifiques, les couvertures offertes et les réalités de chaque patient·e.
Dans cet article, je partage quelques réflexions issues de mon expérience, ainsi que des informations pratiques et des suggestions d’outils pour soutenir nos décisions. On se lance!
Les avantages de la vaccination en pharmacie sont nombreux et touchent plusieurs parties prenantes.
En tant que pharmacienne, j’ai été confrontée à une variété de défis lorsque j’ai commencé à vacciner au Québec. Cela m’a demandé de me familiariser avec divers aspects de cette pratique. Je vous partage mes réflexions personnelles à leur sujet.
En tant que ressource de première ligne, il est essentiel de répondre aux préoccupations et incertitudes liées à la vaccination en vulgarisant les données scientifiques. Cela suppose d’être à la fois clinicien, pédagogue et accompagnateur, capable de traduire la science en conseils concrets et rassurants.
En tant que pharmacienne, l’un des premiers défis auquel j’ai été confrontée lorsque j’ai commencé à vacciner au Québec a été de me retrouver parmi les nombreuses références. Malgré la formation obligatoire au PIQ (Protocole d’immunisation du Québec), j’ai mis un certain temps à me familiariser avec sa présentation et à le parcourir avec aisance.
Le PIQ est un document solide et bien structuré, riche en renseignements cliniques fiables, mais il m’est déjà arrivé, en pleine journée de vaccination, de chercher une information précise dont je savais qu’elle s’y trouvait… sans réussir à remettre la main dessus sur le moment.
Souvent, je connaissais la réponse, mais j’aurais aimé la confirmer rapidement, noir sur blanc. Bâtir sa confiance clinique exige de l’expérience et une grande familiarité avec les ressources.
Chaque province possède son propre manuel d’immunisation. Au Québec, c’est le Protocole d’immunisation du Québec (PIQ), qui encadre la pratique et la gratuité.
Je vous fais part des références qui me guident dans mon cheminement décisionnel.
Ensemble, ces outils forment une boîte à ressources incontournable. Notez que les ressources 2 et 3 complètent le manuel provincial, mais ne le remplacent pas.
Parenthèse clinique : entre programme d’immunisation et choix individuel
La question de Mme Gagnon est un bon rappel : les programmes d’immunisations financent certains vaccins pour des raisons populationnelles (impact, faisabilité, coût-efficacité). Mais pour une personne en particulier, la meilleure option peut différer selon son âge, ses comorbidités ou même ses préférences.
Exemple de la vaccination contre le zona au Québec. En date de la rédaction de cet article, le Programme québécois d'immunisation finance la vaccination contre le zona chez les personnes immunocompétentes de 75 ans et plus et les adultes de tout âge atteints d’une condition menant à une immunosuppression. Or, de son côté, le CCNI recommande fortement que le vaccin recombinant contre le zona soit offert à tous les adultes immunocompétents âgés de 50 ans et plus.
Il faut comprendre qu’un vaccin doit passer par plusieurs étapes entre sa commercialisation et son inclusion dans un programme provincial. Il est donc possible qu’un vaccin soit recommandé par des comités d’experts, mais pas immédiatement financé par un programme public.
Ce décalage souligne l’importance de rester au fait de ce qui se passe hors programme provincial pour bien informer les personnes sous nos soins et les aider à prendre des décisions éclairées.
Avec l’afflux constant de nouveautés, les changements fréquents aux calendriers d’immunisation et la pression du quotidien au comptoir, il est facile de laisser filer des occasions de vacciner en pharmacie.
C’est là qu’un outil comme le module optionnel « Opportunités d’interventions » de RxVigilance (en version intégrée) devient précieux. Sa section sur la vaccination est conçue pour aider l’équipe en pharmacie à repérer rapidement les besoins vaccinaux et à offrir des services qui y répondent.
Plutôt que de remplacer le jugement clinique, l’outil offre un soutien pratique : il met en évidence les personnes à risque selon les recommandations en vigueur, et propose des repères concrets pour alimenter la discussion. Les suggestions sont adaptées à chaque province, en fonction de son calendrier et de son cadre législatif.
Eh bien, son histoire souligne qu’en matière de vaccination, il existe un espace où le rôle des pharmacien·ne·s est essentiel.
La vaccination ne se résume pas à l’administration d’une piqûre. Chacun d’entre nous peut accompagner ses patient·e·s dans leurs choix vaccinaux et leur offrir un parcours complet en les informant, les éduquant, les conseillant et les rassurant.
C’est là que notre expertise de pharmacienne ou de pharmacien prend tout son sens, et c’est désormais une partie intégrante de notre pratique.
Bonne lecture!
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